RESEAU

dimanche 6 avril 2014

Maria Borrély. Sur tous les fronts

 

Maria Brunel, troisième de cinq enfants, est née le 16 octobre 1890 à Marseille où son père est gardien de la paix. Elle passe les premières années de sa vie à Aix en Provence où, atteinte de poliomyélite, elle reste en convalescence chez son oncle, directeur local du « Petit Marseillais », qui n'est pas sans rappeler le merveilleux Oncle Jules du petit Marcel Pagnol. A la mort de cet oncle, elle va rejoindre sa famille qui habite, désormais, Mane.
A 16 ans, elle fait son entrée à l’Ecole Normale d’institutrices de Digne. Après de brillantes études, elle obtient son premier poste au hameau de Certamussat. C’est là qu’elle rencontre son futur mari, Ernest Borrely, il est instituteur comme elle et a un poste à Maison Méane.

En 1914, Ernest Borrély part pour le front, elle reste seule avec son jeune fils Jacques, âgé de trois ans.
En 1917, Ernest Borrély est évacué du front pour une grave maladie d’estomac.
Les horreurs de la Grande Guerre affirment les positions pacifistes de Maria.

Le couple est muté à Seyne puis à Puimoisson en 1919. Maria s’engage dans le militantisme syndicaliste, et occupe le poste de secrétaire du syndicat des instituteurs et institutrices des Basses-Alpes.
Comme son mari, elle adhère au Parti communiste dès le congrès de Tours, avant de s'en retirer en même temps que lui en 1928. Sa carrière de militante syndicaliste est par contre plus longue. Elle occupe d'ailleurs le poste de secrétaire de la Fédération des membres de l'enseignement laïc (FMEL), de tendance anarcho-syndicaliste

Le couple reçoit de nombreux amis intellectuels dont les opinions pacifistes et internationalistes prolétariennes sont proches des leurs, comme les peintres Joseph Bœuf et Jacques Thévenet, Gabriel Péri, Édouard Peisson et surtout Jean Giono.

Après un premier écrit : « L’Aube » sur le végétarisme, publié à compte d’auteur, elle édite (1930) son premier roman : « Sous le Vent ».

Jean Giono va l’aider grâce à sa notoriété. Il en parle à André Gide qui va beaucoup aimer le livre et va la faire éditer. Il va lui écrire : « J'ouvrais votre manuscrit plein de crainte, et dès les premières pages vous m'avez séduit, vous m'avez « eu », comme l'on dit aujourd'hui ». Et Gide de souligner : « une extraordinaire concision, une richesse de couleurs, une sonorité étrange, une vigueur subite dans les moindres phrases des dialogues, la puissance d'évocation d'une atmosphère un peu fantastique, et pourtant extraordinairement réelle. »
Le livre paraît chez Gallimard. C'est un drame fantastique dont le principal personnage est le vent.

« Le mistral élargissait les confins de l'horizon, bleuissait le firmament, affinait la netteté des montagnes paraissant plus proches dont on distinguait, dans une atmosphère de cristal bleu, le détail sculptural, étonnamment précis : les rocs chauves, les échancrures, les éboulis dont on voit toutes les pierres, les escarpes avec leurs sillonnements, leurs réseaux de tubulures creusées dans le granit, et remplies d'ombre noire ».
Sous le vent

1930-1934, parution successive du 2ème et 3ème roman paysan : "Le dernier feu" ou l'histoire d'un village Bas-Alpin qui meurt et "Les reculas" ou l'histoire d'un petit village de la vallée de l'Ubaye qui vit sans soleil plusieurs mois durant.

« Il était tout petit, tout rôti, tout calciné par le soleil. Ça avait tordu de longs muscles noirs autour de ses bras d'argile. Une petite poitrine d'oiseau tout en feu respirait de solides coups dessous un gilet en poils de chèvre. On ne pouvaient pas savoir si ses pieds s'allongeaient jusqu'au bout de ses souliers mais on voyait très bien ses jambes maigres comme des hampes de lavande, et de chaque côté de son front qui éclairait tout net le poil de maïs de son visage, il y avait deux petites bosses comme la naissance de cornes. »
Le dernier feu

En 1933, les Borrély s'installent à Digne où Ernest a été nommé. Tandis que son mari se consacre au journalisme militant, Maria est de plus en plus désillusionnée par le mouvement communiste et syndical dominé par le stalinisme. Le couple ne tarde pas à se séparer. Très affectée, elle demande sa mise à la retraire proportionnelle et rompt toute relation avec son éditeur. Elle continue d'écrire, mais il s'agit désormais d’œuvres d'inspiration mystique qu'elle refuse de faire publier.
Pendant l'Occupation, Maria Borrély sort de sa retraite pour s'engager dans la Résistance. Elle accueille à son domicile les réunions du comité départemental de Libération et organise avec son fils Pierre l'évasion de son mari arrêté par la Gestapo. À la Libération, Ernest Borrély devient président du Conseil général des Basses-Alpes, poste qu'il occupe jusqu'à sa mort en 1959.
Après la Libération, elle retourne à ses préoccupations spirituelles
C’est ainsi qu’elle rentre en contact avec Alexandra David-Neel qui l’aide dans ses études de la philosophie hindouiste. Elle va transcrire par écrit l’ensemble de ses réflexions mais ses notes vont rester à l’état de manuscrits.

Les mains vides, un court roman qui raconte l'errance de chômeurs au cœur de l'hiver marseillais, paraît plus de vingt ans après sa mort, en 1989.

Un collège de Digne porte aujourd'hui son nom.






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