Laragne touristique |
I) Le phare
Dans un précédent article sur le port, j’ai omis de
parler du phare, ce dont certains lecteurs m’ont fait reproche en toute
gentillesse. Cet oubli fut volontaire, car il faut dissocier l’histoire du
phare de celle du port.
Lorsqu’il
est question du phare, tout laragnais « de souche » sait bien sûr ce
dont il s’agit mais nos hôtes de passages ou nos concitoyens de fraîche date
pensent sans doute qu’il s’agit de l’assemblage hideux de poutrelles
peinturlurées de gris qui soutiennent une lanterne électrique dont les
clignotements verdâtres démarrent dès la tombée de la nuit.
Eh
bien ! En dépit du fléchage stupide qui les conforte dans leur ignorance
(et hérisse la plupart d’entre nous) il
n’en est rien ! Le seul, l’unique, le véritable phare de Laragne se dresse
en effet à quelques mètres de là, et la jetée l’englobe en partie.
Historique :
Or, en 1971, les travaux entrepris
pour l ‘assainissement de la plage située au sud-est de la jetée, mettent
à jour un alignement de pieux (datés du néolithique moyen) recoupé par un
ouvrage de maçonnerie, en bel appareillage, qui se termine sous l’actuelle
jetée.
Les fouilles entreprises en 1972
et 1973 avec des moyens importants, permettent de dégager les soubassements
d’un temple antique qui servit d’assise au phare, le rivage se situant à cette
époque à plus de deux cent mètres de celui que nous foulons actuellement.
Le musée de Gap abrite d’ailleurs
le très belle mosaïque d’Arachnea (dont le culte venu d’Orient est connu sur
l’ensemble du pourtour méditerranéen) mise à jour à cette occasion, ainsi
qu’une belle collection de poteries (remarquer surtout les vases de facture
ibérique et l’importante collection d’ex-voto trouvés in-situ).
Cette découverte devrait
d’ailleurs clore les discussions sur l’origine du nom de
« Laragne » : divers auteurs le faisaient dériver d’une auberge mythique qui se serait
tenue sur les bords de la route. Il apparaît que ce nom vient de la plus haute
Antiquité : Arachnea est l’hellénisation d’une déesse du
panthéon perse que les contemporains d’Alexandre assimilèrent aux Parques, ces
fileuses qui tissaient la destinée des hommes.
Au cours des siècles, l’invasion
progressive de la mer protégea la construction des débordements de la
christianisation. Y avait-il déjà à l’époque de ce temple une activité maritime ?
Rien ne permet de l’affirmer, même si les fouilles entreprises par le préfet
Ladoucette à la
Bâtie-Montsaléon mirent à jour un fragment de stèle votive,
très abîmé, dont l’inscription est interprétée comme un remerciement à Neptune
« par les nautes du port ». La suite de la dédicace fait défaut, mais
le port le plus proche de la Bâtie-Montsaléon ne saurait être que celui de
Laragne.
En 1791, les cloches des églises de
Mison et de Laragne (que la
Convention veut fondre pour en faire des canons) sont déposées et cachées dans la maçonnerie
que les travaux de construction de la jetée royale ont simplement
« englobée ».
En remerciement, le clergé
finance l’érection d’un phare véritable (voir
plans et délibérations au musée local) « en pierre de Guillestre et marbre
du Queyrois »–sic- mais le projet n’aboutit pas du fait de fortes
dissensions entre les personnalités locales. Il faut attendre 1976 pour
qu’enfin une construction signale le port au moyen d’un fanal électrique.
Pour
découvrir le phare : s’avancer sur la jetée jusqu’à l’endroit où débute
l’enrochement des blocs brise-lames. On détectera alors une rupture tant dans
la facture que dans l’alignement de la maçonnerie : il se produit un
infléchissement de la jetée vers l’intérieur : c’est l’emplacement exact
du véritable phare de Laragne.
Une gravure de 1712 (musée local)
montre d’ailleurs qu’à cette époque, une excroissance cylindro-conique
d’environ deux mètres de haut ne laissait aucun doute sur sa nature. Cette
excroissance disparut par la suite, lors des travaux de réfection de l’époque
napoléonienne.
Pour
en savoir plus :
« Le
phare de Laragne » Col.Dusabre. Ed « Prestiges de
France » 1976 (épuisé)
« Pittoresques
Alpes du Sud » Ed. Duchemin 1916
« Fouilles
du phare de Laragne » Marcel Chabrette. Soc.d’Etude des
Hautes-Alpes. 1978
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire