RESEAU

mardi 24 juin 2014

Et pour les bateliers du Rhône...


Extrait de « Lou Pouèmo dou Rose » « le Poème du Rhône »,
de Frédéric Mistral.

La prière du  « Notre Père », revisitée par Patron Apian, batelier de son état.

Cant 1, Patroun Apian

« E dre sus lou poutin, la testo nuso,
Adounc Patroun Apian em' un grand signe
De crous, à-z-auto-voues- q'ausisson tousti
Lou papèu à la mau, - eu entamo
La piègo dou matin : O nostre paire
Que siés au cèu, toum noum se santifique !
Vèn coume acò. Lis ome fan l'escouto
D'ageinouioun o ben la testo clino.
Lou sagarés blanquinous lis emborgno,
Atapant li mountagno e li broutieros
Que tout-de-long accoumpagnon lou flume ;
E podon ié coumta sus l'embourgnado
Jusqu'à Givors et belèm jusquo à Vieno.
Eù countuniant : Toun règne nous avèngue !
Dis, l'adavau ta volonta se fague
Coume adamount ! Lou pan quoutidian nostre
Dis, vuei parge-nous-lou ! De nòsti dèute
Fai-nous la remission, coume nous-autri ;
En quau nous as devent, dis, fasèn quite...
- Hoù ! Toco-biòu ! Pièi se coupant bramavo
Capounas de pas Diéu ! Dorme, fulubio !
A queli chevalas, amount, li veses
Que dintre si cabestre s'estrangulan ?...
Un batafiéu que vous cenglisse touti !
E reprenent : De tentacioun nous gardes !
E tiro-nous dou maleu ! Ansin siegue

Chant 1, Patron Apian

« Et droit sur le tillac, la tête nue
patron Apian, avec un grand signe de croix,
et à haute voix- que tous entendent-
le chapeau à la main : O notre père
Qui es au ciel, que ton nom se sanctifie
dit-il. Les hommes se sont tus
agenouillés ou inclinant la tête.
L'épais brouillard blanchâtre les aveugle,
dérobant les montagnes et les brotteaux
qui tout le long accompagnent le fleuve
et ils en sont sûrs, d'aller à l'aveuglette
jusqu'à Givors, peut-être jusqu'à Vienne.
Mais lui, continuant : Ton règne nous advienne !
Dit-il, et qu'en aval ta volonté se fasse
comme en amont!  Notre pain quotidien
dit-il, donne le nous ce jourd'hui ! De nos dettes
fais-nous la rémission, dit-il, comme nous autres
les remettons ceux qui nous redoivent...
Parfois s'interrompant : «  Toqueboeuf ! Braillait-il
grand capon de pas Dieu, tu dors, eh ! Fainéant ?
Ces malheureux chevaux ; en amont, les vois-tu
qui s' étranglent dans leurs chevêtres ?...
Une garcette qui vous cinglât tous ! »
Et reprenant : De tentation garde-nous !
Et tire-nous du mal-être ! Ainsi-soit-il !

Frédéric Mistral



1 commentaire:

  1. Bravo Gaetan ! il s'agit d'un excellent travail de recherche dans les derniers travaux publiés

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