C'est une maison en bord de mer où lui
tente de soigner sa mélancolie et où elle tente d'approcher son
cœur. Il fait de longues promenades de fuite et de douleurs
éteintes, particulièrement au soir, lorsque la lumière devient
orange et le sable violet. Le long vol des oiseaux, la hauteur des
vagues, le va-et-vient des courants entre le soir et la mer, tout
cela a quelque chance d'apaiser son cœur. Ce qu'il ressent ce n'est
pas vraiment le malheur, non, mais ce n'est pas la joie non plus. Les
choses, sitôt qu'il commence à trop entrer en elles, le dégoûtent,
ne lui semblent que molécules sans poésie. Elle pense à lui, sa
conviction s'épuise. Comment aimer un homme qui a toujours les yeux
ailleurs ? Il se dégage de ses bras dans la maison en bois. La mort
ne le tente pas, il aime la vie, le problème n'est pas ici. Derrière
son obstination à aimer les choses et les hommes il y a cette
incapacité à pouvoir les toucher, à s'intégrer en elles. Il ne
ressent pas assez la réalité et ce n'est que dans le malheur qu'il
acquiert une lucidité. La haine fait frémir les cœurs que n'agite
pas l'amour. Ils habitaient un appartement dans une ville du sud,
mais la ville l'épuisait alors qu'elle aime les cinémas et les
places vibrantes. Il ne fuit pas les lumières mais elles ne
s'accordent pas à son humeur. Elles lui échappent. Elles ne
brillent pas en lui.
"Tu as les yeux lourds mon amour
-Je n'ai pas le cœur léger -Tu as le dos courbé -Je suis bossu de
ton corps sur mon dos -Tu es dur comme un coquillage -Mais je ne
chante plus à la mer"
Les questions par lesquelles elle tente
de le comprendre ne reçoivent que des soupirs. Elle ne s'y prend pas
mal ; elle ne pourrait s'y prendre autrement, mais elle s'accuse au
fond d'elle, ce qui en somme est légitime. Il pourrait lutter
davantage mais se laisse bercer par la mélancolie. Elle est facile
comme le sable qui recouvre le bout des pieds : on la laisse là avec
son contact mouillé et son odeur de sel, parce que, quelque part,
elle fait du bien et il le sait, un peu honteux de lui-même. L'âme
qui dérive, sans amarres.
Julien B.
La Batie-Neuve,
Hautes-Alpes.
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